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CAFÉ JURIDIQUE N°4: LE SECRET PROFESSIONNEL: QUE DIT LA LOI ?

La rubrique « CAFÉ JURIDIQUE » vous revient dans son quatrième numéro.

Il est des professions qui, en raison de leur sensibilité ou des dossiers évoqués, imposent à ceux qui les exercent l’obligation de respecter le secret professionnel. Par définition, le secret professionnel est l’obligation imposant à des professionnels de ne pas dévoiler les confidences recueillies pendant l’exercice de leur profession. Il est régi par la loi pénale et est un devoir auquel sont contraints les professionnels ou membres d’un corps de métier ou de profession. En effet, son observation contribue in extenso à la consolidation et à la protection de la vie privée.

Le secret professionnel fait parfois partie des clauses contractuelles même en l’absence de toute disposition expresse. Certaines professions ou corporations l’ont même érigé en règle cardinale dans leurs chartes ou codes de déontologie.

La France par exemple en a fait un devoir fondamental puisqu’il est enchâssé dans la Charte des droits et libertés de la personne.

L’article 9 de ladite Charte dispose: « Chacun a droit au secret professionnel.

Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu’ils n’y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi.

Le tribunal doit d’office assurer le respect du secret professionnel. »

Le secret professionnel tel que définit, suscite en lui-même autant de questions qu’il convient d’élucider. Ces questions se résument comme suit: Qui est tenu par le secret professionnel? Quel est le but du secret professionnel? Quand lever le secret professionnel? Comment respecter le secret professionnel? Quelles sanctions encourt l’auteur d’une violation du secret professionnel?

Au Bénin, le secret professionnel tel qu’il apparaît à l’article 622 de la loi n°2018-16 du 28 décembre 2018 portant Code pénal concerne toute personne qui, dans son état ou sa profession ou en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, a reçu des informations auxquelles la loi accorde le caractère confidentiel ou secret. Plus précisément, il s’agit des médecins, chirurgiens, pharmaciens, sages-femmes, infirmiers, infirmières et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu’on leur confie. Cet article fournit une gamme assez variée de personnels tenus au respect du secret professionnel mais ceux du corps médical dominent en majorité. Cela témoigne de la sensibilité de la profession qui appelle de la part des personnes du corps médical à une sorte d’obligation à la retenue, à la confidentialité et au respect de la vie privée du patient puisque le secret professionnel touche généralement la vie privée de l’individu ou a trait aux informations dont la révélation porterait atteinte à celle-ci.

Le respect du secret professionnel est davantage sollicité en matière de prestation de service où, le client, dans le but de se voir fournir des services de qualité, se doit de mettre à la disposition de son prestataire (avocat, notaire, huissier, médecin, chirurgiens, pharmaciens, infirmier, etc.), des informations jugées nécessaires et devant être gardées secrètes ou confidentielles. Le secret professionnel est donc une garantie ou une assurance qui participe à la protection des informations fournies au prestataire du service. Le droit au secret professionnel interdit donc au prestataire de service de divulguer certains éléments d’information ou à l’employé d’une industrie de révéler les secrets de fabrication ou de conception des produits ou articles de tous ordres à ses concurrents directs ou indirects.

Il est à préciser cependant que ce ne sont pas tous les renseignements obtenus dans l’exercice de la profession, ni tout dossier d’un client, ni tout ce que le prestataire sait sur son client qui sont entièrement couverts par le secret professionnel.

Néanmoins, le droit au bénéfice par le client du secret professionnel fait appel à quatre (04) conditions alternatives:

1- Le renseignement est de nature confidentielle;

2- Le renseignement vient à la connaissance du prestataire ou du professionnel par communication écrite ou verbale;

3- Le renseignement est révélé au prestataire ou professionnel en raison de sa qualité d’ingénieur;

4- Le renseignement est communiqué au prestataire ou professionnel par un client pour qu’il soit en mesure de fournir un service pour le compte de ce dernier.

Concrètement, le prestataire doit tenir compte de son obligation de respecter le secret professionnel dans ses conversations avec son entourage et avec les autres clients, sa correspondance, la rédaction d’articles scientifiques, ses relations avec l’État, l’aménagement de son bureau et la façon de conserver ses dossiers.

L’instauration par le législateur du respect du secret professionnel a pour but de protéger la relation de confiance nécessaire pour certains professionnels tels que les médecins, avocats, psychologues, assistants sociaux et tant d’autres.

Bien que le respect du secret professionnel soit une exigence légale dont la violation est passible de peines, il est des cas où il peut être levé. Le secret professionnel peut être levé dans trois (03) cas: avortement pratiqué dans des conditions autres que celles qui sont prévues par la loi; sévices ou privations sur mineur de quinze (15) ans; violences sexuelles (si la victime autorise la levée du secret). En France, le secret professionnel peut même être levé lorsqu’un individu « détenant une arme à feu ou ayant manifesté l’intention d’en acquérir une » présente « un caractère dangereux pour lui-même ou pour autrui… »

La levée du secret professionnel telle que prévue par la loi dispense ipso facto de peines. C’est le moins que l’on puisse retenir des alinéas 2, 3 et 4 de l’article 622 du code pénal qui dispose : « Toutefois, les personnes ci-dessus énumérées, sans être tenues de dénoncer les avortements pratiqués dans des conditions autres que celles qui sont prévues par la loi, dont elles ont eu connaissance à l’occasion de l’exercice de leur profession, n’encourent pas, si elles les dénoncent, les peines prévues à l’alinéa précédent. Citées en justice pour une affaire d’avortement, elles demeurent libres de fournir leur témoignage à la justice sans s’exposer à aucune peine.

Les mêmes personnes n’encourent pas les peines prévues à l’alinéa 1er lorsqu’ils informent les autorités médicales ou administratives chargées des actions sanitaires et sociales des sévices ou privations sur la personne de mineurs de quinze (15) ans et dont elles ont eu connaissance à l’occasion de l’exercice de leur profession ; citées en justice pour une affaire de sévices ou privations sur la personne de ces mineurs, elles sont libres de fournir leur témoignage sans s’exposer à aucune peine.

N’encourt pas les peines prévues à l’alinéa 1er, tout médecin qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République, les sévices qu’il a constatés dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer qu’un viol ou un attentat à la pudeur a été commis ».

Mais quid des sanctions lorsque le respect du secret professionnel vient à être violé?

C’est l’alinéa 1er de l’article 622 du code pénal béninois qui renseigne sur la sanction que peuvent encourir ceux qui enfreindraient au respect du secret professionnel.

Aux termes des dispositions de cet article, : « Les médecins, chirurgiens, ainsi que les sages-femmes, les infirmiers, les infirmières et toutes autres personnes dépositaires, par état et par profession ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu’on leur confie, qui, hors le cas où la loi les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs, auront révélé ces secrets, seront punis d’un emprisonnement de un (01) mois à six (06) mois et d’une amende de cent mille (100.000) francs CFA à cinq cent mille (500.000) francs CFA ».

La révélation de secrets professionnels hors le cas où la loi en donne l’autorisation est souvent le fruit d’une immaturité de la part du dénonciateur à exercer la profession, ou de la recherche de sa part, d’un intérêt quelconque auprès de la personne à qui ces secrets sont dénoncés ou révélés. Se pose alors la question de morale et d’éthique dans certaines professions ou corporations.

Jesukpégo Elie GBEDEMAKOU, Conseiller juridique de la Fondation VISSIN, Directeur du Département Droits de l’Homme, Chargé des relations avec les institutions

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