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CAFÉ JURIDIQUE N°3: LA RÉPRESSION DU MARIAGE FORCÉ OU ARRANGÉ OU CONCUBINAGE FORCÉ EN RÉPUBLIQUE DU BÉNIN

 

La rubrique « CAFÉ JURIDIQUE » vous revient dans son troisième numéro spécial traitant d’un sujet brûlant qui demeure toujours d’actualité. Il s’agit de la répression du mariage forcé ou arrangé ou concubinage forcé en République du Bénin.

Le législateur civil béninois n’a pas occulté d’aborder et de réprimer au travers des dispositions assez pertinentes ce phénomène qui dure depuis des siècles au Bénin. Ceci est loin d’être un soulagement pour les défenseurs des droits humains qui se battent au quotidien malgré la présence d’une législation qui traite déjà du sujet.

Le mariage forcé ou arrangé ou encore le concubinage forcé en République du Bénin est une réalité socio-culturelle qui caractérise l’ensemble des pays au sud du Sahel.

Les mariages arrangés permettaient à la fois d’établir la paix et de bâtir des empires depuis des siècles. C’est encore pratiqué un peu partout en Asie, en Afrique, au Moyen Orient. Des milliers de femmes et d’enfants sont victimes des mariages arrangés chaque année souvent avec la complicité de certains acteurs de la justice.

Ce phénomène qui perdure est une préoccupation majeure pour le législateur béninois. A cet effet, plusieurs lois au niveau national et international ne manquent de réprimer avec fermeté la pratique. Et si le mal persiste toujours dans plusieurs pays tels que le Bénin, le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Sénégal pour ne citer que ceux-là, il est à signaler que cela est dû, non seulement à l’attachement de certaines communautés à leurs traditions, leurs coutumes, leurs religions, mais aussi, à leur condition de vie précaire. Ainsi, les principales victimes de cette pratique aux conséquences néfastes sont les jeunes filles et les femmes.

Les seuls et rares cas portés à la connaissance de la justice ne manquent pas d’attirer toute l’attention des gardiens de la loi (juges, procureurs, avocats, etc.) qui se réfèrent aux textes de loi existants pour réprimer le phénomène.

Mais que dit concrètement la loi à ce sujet ?

Se référant à la loi n°2011-26 du 09 janvier 2012 portant prévention et répression des violences faites aux femmes, le mariage forcé désigne tout mariage ou concubinage contracté ou décidé sans le consentement libre et éclairé des deux parties concernées (art.3 al. 5). Le défaut de consentement dans un tel mariage est souvent lié aux avantages que tireraient les deux familles. Le libre consentement des parties est influencé et pris en otage par suite des évènements tels que le dol, fraude, menaces ou violences de sorte que l’absence desdits évènements aurait eu pour conséquence immédiate une renonciation de la part des deux ou de l’un des futurs mariés.

Il est à noter que faisant référence à la loi n°2002-07 portant Code des personnes et de la famille en République du Bénin, le consentement personnel au mariage de chacun des futurs époux, même mineur fait partie intégrante des conditions de fond du mariage (cf art. 119 du CPF) à moins qu’il s’agisse d’un mineur de moins de dix-huit (18) ans où le consentement doit provenir de la personne qui exerce l’autorité parentale à son égard (cf art. 120 du CPF). En cas de vice de consentement, il peut être prononcée (par le juge), la nullité (relative) du mariage célébré par l’officier de l’état civil (art. 145 du CPF).

Le mariage forcé ou arrangé ou concubinage forcé tel que défini par le législateur est constitutif d’une infraction et donc réprimé. Selon l’article 31 de la loi portant prévention et répression des violences faites aux femmes, « Toute personne qui se rend coupable ou complice d’un mariage forcé ou arrangé ou concubinage forcé, comme défini à l’article 3 de la présente loi est punie d’un emprisonnement de un (01) an à trois (03) ans et d’une amende de cinq cent mille (500.000) francs à deux millions (2 000 000) de francs ».

Cette répression qui paraît tout de même logique est loin de dissuader les habitués de ce fléau malsain. Il s’avère indispensable de mener des actions concertées ; ceci de la part des autorités étatiques (au plan national et local), religieuses, des organisations ou associations non gouvernementales qui s’intéressent à la question afin de sensibiliser davantage la société sur les conséquences de ce phénomène et ainsi l’éradiquer.

Jesukpégo Elie GBEDEMAKOU, Conseiller juridique de la Fondation VISSIN, Directeur du Département droits de l’Homme, Chargé des relations avec les institutions

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