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CAFÉ JURIDIQUE N°6: LA PRATIQUE DU CHARLATANISME EN RÉPUBLIQUE DU BÉNIN : CE QUE DIT LA LOI PÉNALE

 

La rubrique « CAFÉ JURIDIQUE » vous revient dans son sixième numéro spécial.

Depuis plusieurs décennies, certaines pratiques culturelles et cultuelles en Afrique et plus généralement au Bénin, ont tendance à mettre en péril la quiétude et la bonne cohésion sociale.

Si ces pratiques sont pour la plupart le fruit de l’héritage ancestral qu’il faudra entretenir et pérenniser, force est de savoir qu’aujourd’hui, le charlatanisme est souvent décrit comme une fraude dans le domaine médical avec la caractéristique saillante d’une promotion agressive.

De plus, il serait fatal d’occulter le fait que, plusieurs pratiquants font usage des organes humains, commettent des assassinats pour parvenir à leur faim. Il est tout à faire normal que le législateur intervienne afin de réprimer de pareils individus adoptant des comportements peu orthodoxes.

Étymologiquement, le charlatanisme, attesté dès les années 1572, le mot est emprunté à l’Italien charlatan « charlatan », issu du croisement de cerretano « habitant de Cerreto » (village de Cerreto di Spoleto dont les habitants vendaient des drogues sur les places publiques) et de ciarlare « bavarder, jaser ». Il désigne donc la manière d’être ou d’agir propre à un charlatan. Pratiquant du charlatanisme, le charlatan est une personne « prétendant de manière frauduleuse ou par ignorance disposant de compétences médicales » ou « une personne qui prétend, professionnellement ou publiquement, posséder des compétences, des connaissances, des qualifications qu’elle ne possède pas ».

De manière générale, le charlatan pratique de l’imposture, ou un jeu de dupes envers autrui, grâce à des trucages, des déformations de la réalité ou des falsifications, en vue de gagner sa confiance, généralement pour obtenir de l’argent ou tout autre avantage. Le charlatanisme comprend alors des diagnostics douteux, ainsi que des traitements non testés, à l’efficacité non avérée, ou réfutés, en particulier pour les maladies graves telles que le cancer.

Le charlatan fait recours aux arts divinatoires assemblé avec la magie pour régler les problèmes. Ce phénomène social est l’œuvre des chefs ou dirigeants des religions traditionnelles.

Au Bénin, les assassinats, le prélèvement d’organes humains par des charlatans avec la complicité de certains individus sont légion.

La justice béninoise a connu de plusieurs cas de pratique de charlatanisme dont les auteurs, coauteurs et complices sont lourdement condamnés conformément à la loi pénale tandis que d’autres sont relâchés au bénéfice de doute. Le cas ayant retenu l’attention de tout le monde est celui en date du 03 février 2020 où la fillette âgée de 7 ans et répondant au nom de Gracia a été froidement assassinée à Cotonou.

Mais que dit concrètement le législateur béninois à ce sujet ?

Le charlatanisme est prévu et réprimé par les dispositions de l’article 458 de la Loi n° 2018-16 portant code pénal en République du Bénin.

Aux termes de cette loi, « Est puni de la réclusion criminelle de dix (10) ans à vingt (20) ans, quiconque s’est livré ou a participé à des pratiques de sorcellerie, de magie ou de charlatanisme, susceptibles de troubler l’ordre public ou de porter atteinte aux personnes et aux biens ».

La pratique du charlatanisme est considérée comme un crime de même que les pratiques de sorcellerie et de la magie. L’élévation du taux de la peine montre la volonté du législateur à mettre un terme à de pareilles pratiques devenues recrudescentes dans la société africaine en général et celle béninoise en particulier. De façon précise, nous constatons que le législateur n’a pas listé les éléments en présence desquels l’on peut penser à la pratique du charlatanisme mais l’acte matériel du charlatanisme peut toutefois renvoyer aux prélèvements d’organes humains (os, yeux, cœur, poumons, crâne, etc.) ou du sang dans un but sacrificiel ou rituel.

Jesukpégo Elie GBEDEMAKOU, Conseiller juridique de la Fondation VISSIN, Directeur du Département Droits de l’Homme, Chargé des relations avec les institutions.

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